lundi 26 octobre 2015

Papa, tu es fou de William Saroyan



Quand on n'a plus le sien, il n'est pas facile de se tourner vers un livre qui met autant en avant le mot "papa". Cependant, il arrive que l'enthousiasme d'un libraire soit suffisamment fort et sincère pour que l'on n'ait plus peur de ce genre de mise en exergue.  Pour cette critique, j'ai presque eu envie de me contenter d'écrire "c'est beau", "c'est beau et positif". Cependant, comme la beauté d'un texte a mille manières pour se manifester, je me suis dit qu'il fallait développer un peu.

L'histoire n'est pas très compliquée. Nous sommes dans les années 50 en Californie. Un garçon de 10 ans va aller vivre quelques temps avec son père. Le papa est écrivain mais n'a pas le sou. Sans cacher sa situation à son fils, il va s'arranger pour que le quotidien, nécessairement fait de peu sur le plan matériel, ne soit jamais pénible, bien au contraire. C'est un papa imaginatif qui invente des recettes  avec tout ce qu'il trouve dans les placards et leur donne des noms fabuleux comme "le riz de l'écrivain". C'est un papa qui prend le temps de jouer avec son fils, avec des cartes, avec des mots, de courir avec lui sur la plage et de lui montrer les trésors de l'Océan. Le petit garçon pose beaucoup de questions et le papa répond toujours, de la façon la plus honnête possible, une merveille de réponse,  pleine d'optimisme, de sensibilité ou de poésie. Le petit garçon n'aime pas l'école et le papa fait ce qu'il peut pour le convaincre que si, il l'aime quand même un peu, sans s'en rendre compte. Pourtant, on devine combien la compagnie de ce papa créatif et positif doit être plus attrayante.

Oui, c'est vrai, il est peut-être un peu fou, pas très raisonnable en tout cas, quand il accepte de faire 900 km pour aller à Half Moon Bay et de dépenser ainsi leurs maigres économies, tout ça parce que son fils trouve le nom joli.

Mais l'éducation n'est pas qu'affaire de contingences matérielles, fort heureusement et celle que propose William Saroyan (il s'agit de lui) à son fils Aram est riche des valeurs humanistes et de l'amour de la vie qu'il s'efforce de lui transmettre. Apprendre à regarder différemment, s'enthousiasmer de tout, essayer de faire du mieux que l'on peut, poser des questions, chercher à comprendre, autant de moteurs qui font que chaque journée passée est à elle seule une histoire, chaque individu, un écrivain. Ensuite, c'est juste une affaire de mots à trouver, ou pas. 
Un roman qui a l’air minimaliste par son histoire simple, son format, son vocabulaire (c’est un enfant qui parle) mais qui ne l’est pas du tout en fait car il vient souligner des réflexions fondamentales. Rien n’est appuyé mais tout paraît essentiel ou plutôt l’essentiel se dégage comme un magnifique haut-relief finement ciselé et j'en ai juste été béate d'admiration. Oui, c'est ça en fait, j'ai admiré cet essentiel magnifié, j'ai apprécié, cessé d'analyser et ce sentiment au fil de ma lecture m'a dorlotée. Même à l'âge adulte, ça fait du bien.

 A mon père, qui serait sans doute tout étonné que sa petite dernière ait déjà cet âge là. 

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